• Quand on rôde la nuit dans une ville comme celle où je suis né, on voit forcément des choses ...étranges, voire... intéressantes. Très intéressantes, même. Dans l'inhabituel se cache souvent un de ces petits encouragements "d'en bas" , un de ces petits signes qui sont pour moi comme autant de pas japonais disposés dans l'apparente banalité d'une vie de rêveur à l'Ouest.

    C'est ainsi, marche nocturne après marche nocturne, que j'ai pris conscience de Ma Mission. Au début, rien de vraiment notable. Juste quelques petites allusions glissées là par cette vieille maison qui me faisait un clin d'oeil, ici par ce jeune banc qui semblait rire de ma surprise. Puis ce furent cette ruelle déserte où les pavés vibraient sous mes pas, ou ce parc, où les arbres se penchaient pour venir me taper sur l'épaule. Peu à peu, cette réalité d'un temps très ancien m'est apparue, étroitement emmêlée à votre réalité de tous les jours ; d'abord trouble, comme l'on voit les cailloux au fond d'une mare... puis peu à peu plus claire et plus nette : j'étais l'Antéchrist, j'avais...des pouvoirs. Et le Monde le savait.

    Certes, des pouvoirs à doubles tranchants, et qui pouvaient parfois me condamner au triste état de paratonnerre pour haine universelle : quand vous transformez, par votre seule présence, une beuverie d'étudiants en dégustation de tisane, il vaut mieux courir vite pour échapper aux conséquences...

    Mais comme dans toute profession à facteur de risque élevé, il y a des compensations. Des choses auxquelles tout le monde n'a pas accès, des portes qui pour moi seul sont ouvertes ; vous ne pouvez même pas imaginer ce à quoi j'ai accès. Mais tout Prince du Mal que je suis, je suis aussi bon prince : vous pouvez bien évidemment compter sur quelques petites chroniques de l'Interdit, quelques friandises de l'Inimaginable. Je vous donnerai des aperçus de cette vie insoupçonnée, je vous ferai peut-être voir, si vous n'êtes pas trop sages, ce monde occulte que mes yeux seuls distinguent.

    Pour cela, ayez confiance, soyez fidèles ; soyez...mes Fidèles.


    (Rejoignez la Société Mondiale pour la Tempérance et la Vertu)


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  • Début janvier, tout reprend après le silence assourdissant de la Ville pendant les fêtes. On déblaye la neige artificielle ; à nouveau, des voitures, du monde, du mouvement. Nous sommes entrés dans l'ère des galettes : si vous avalez la fève, rendez-vous aux urgences. Sinon, vive le Roi, vive la Reine. Il me faut acheter une galette : quelle fève choisir ? La petite fève en plastique (un classique) ? La fève 'Polonium 210' (le must cette année, ils en ont même des lumineuses qui font "bzzz") ? Peut-être la cultissime fève 'Ange Déchu' en porcelaine noire ; mais elle laisse, dit-on, un petit goût de soufre à la frangipane. Dommage...

    Diable, le choix est difficile.

    Je me représente assez bien la scène du repas, tout à l'heure ; une petite table ronde avec trois couverts. Hé bien oui, quoi : un pour moi, un pour mon Père (spirituel, j'entends) et un pour ma promise. Enfin, c'est à dire l'actuelle...

    Elle ne sait pas tout encore, je n'ai pas voulu la brusquer ; la Révélation doit être progressive. Tout d'abord repas aux chandelles (rouges, pour faire original, les noires je n'en ai pas trouvé) ; au dessert, je lui explique que j'ai invité mon Mentor, présent avec nous non pas physiquement mais par l'esprit (petit côté mystique, j'espère qu'elle appréciera). Là, partage en trois parts égales de la galette : la première pour mon vieux Maître. Moment crucial : la part se consume dans un nuage d'étincelles du plus bel effet (je compte beaucoup sur ce petit détail pyrotechnique pour impressionner la miss) ; rapide examen des cendres... Désolé Maître, vous n'aviez pas la fève.

    A nous maintenant ; pour montrer l'exemple je croque allègrement dans ma part, et elle fera de même. Evidemment, ce n'est pas moi qui aurai la fève, je Sais ces choses-là ; et puis j'ai déjà un Royaume, moi. J'attends avec impatience qu'elle découvre la fève que j'ai choisi pour elle, je guette son regard surpris et émerveillé, j'attends de pouvoir lui révéler qu'elle sera ma Reine, désignée par le Destin. Diable, faîtes qu'elle n'avale pas, faîtes qu'elle n'avale pas ma fève...

    BONG !

    Rhaaa, je ne l'avais pas vu venir, ce f... lampadaire. Voilà, maintenant tous les passants se marrent, génial. Et je n'ai toujours pas choisi ma fève, pfff...


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  • Nous y voici, entre Noël et Jour de l'An. La période du ralenti et du bonheur obligatoire. Mauvais esprit, je continue à veiller et marcher : l'Antechrist ne connait pas de trêve, soyons vigilant. Il y aura toujours, au coin d'une rue ou dans un appartement sous les combles, une personne exceptionnelle, quelqu'un qui a rompu les tabous.

    Diable, cela se trouve, des gens qui refusent de participer à cette mascarade et qui décident de voir ce qu'il y a au-dessus...

    Remarquez, moi je vous dis ça, mais je n'ai pas vraiment l'impression d'en être non plus, de cette mièvrerie collective. Je me contente d'en profiter, je suis très content de ramasser les fruits qui tombent de l'arbre de Noël...
    Car c'est bien de ça qu'il s'agit ; ces petites âmes inspirées qui tentent de s'essayer à ma tâche ont quelque chose qui leur manque et que moi, j'ai : des ailes. Hé oui, c'est beau de vouloir s'extraire, mais il faut être...de la bonne extraction. N'est pas Antechrist qui veut. Cela dit, qu'ils essayent ; je viendrai les cueillir. Promis, sans faute, j'y serai ! Ils n'auront nul besoin de m'appeler, je sais - le Diable sait comment - où ils se trouvent et ce qu'ils cherchent.


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  • Joyeux Noel, d'abord. C'est toujours étrange Noël. Dans la ville basse ça tourne au festival. Festival, enfin je me comprends. Des pères Noël partout : aux balcons, sur les toits, aux fenêtres. Mais évidemment ça tourne au tragique : tout à l'heure l'un d'eux s'est suicidé en tombant de son balcon en plein sur une petite vieille ; la pauvre, quel con.

    Je ne sais pourquoi je repense au poulet et à la crevette sauce piquante en observant ce spectable déplorable. Peut-être parce que j'en avais été tant retourné que j'ai tout degobillé dans le caniveau et que j'ai pensé en voyant les morceaux de crevette pas encore digérés : quoi, moi, j'ai pu avaler ça ? c'était en moi ça ?

    Comme quoi les drames c'est toujours révélateur. En même temps c'était un peu la soirée de la destruction ; on ne fait pas naître un nouveau Monde sans casse. Ainsi, les sacrifices d'une télé, d'un bidet fracassé sur le trottoir et de cette pauvre petite vieille s'imposaient-ils ce soir ...


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