• On ne sait plus parler aux maisons ... et pourtant...

     
    Quand je suis arrivé dans cette ville, j'ai cherché une maison digne de moi. Que diable : je ne suis pas un vulgaire terroriste préparant sa bombe dans un pavillon miteux d'une banlieue pourrie. Non. Le QG où allait se préparer la Fin du Monde devait en imposer. Et puis, je me devais d'impressionner les membres de la S.M.T.V. que j'inviterai chez moi. J'imaginais, je ne sais trop pourquoi, une espèce de Xanadu, avec pinacle, portes majestueuses et une pincée de pseudo gothique... Pas dans le style de la ville. Hélas.

    C'est donc tout à fait par hasard - d'autres y verraient la main du Destin - que j'ai visité la maison où j'habite maintenant. Elle m'a immédiatement séduit et depuis je ne me lasse pas de l'habiter. Comme des cheveux recouvrant le visage d'une adolescente timide, le lierre couvre ses murs, obscurcit ses fenêtres et dissimule ses portes. L'intérieur en est a priori banal : parquet, moulure, cheminée. "A défaut de prestige, voilà bien du charme pour une maison où l'on peut sans rougir inviter une charmante démone pour quelques messes noires" me disais-je. Mais avec le temps j'ai appris peu à peu à comprendre le langage de cette maison, à décrypter le sens caché de ces pièces aux formes étranges, la symbolique dissimulée dans ces moulures irrégulières. J'ai compris le génie extraordinaire qui a façonné ces poignées de portes qu'on a si bien en main et ces courbes merveilleuses qui entre-apparaissent dans les rampes de fer forgé.

    La maison était vide au début ... inhabitée depuis longtemps. C'est en me promenant de long en large dans ses grandes pièces, en explorant ses caves, en guettant par la fenêtre l'hypothétique arrivée du technicien EDF que j'ai véritablement formalisé, théorisé ma pensée : je parlais aux plafonds, j'écrivais sur les murs. La maison restait de marbres au début. Puis lentement, elle est devenue plus réceptive. Les réactions d'une maison sont toujours difficiles à interpréter mais le lent dialogue qui s'instaura entre nous me fût salutaire. Au fur et à mesure de nos discussions, j'affûtais mes arguments tandis que la maison devenait comme une seconde boîte crânienne, entourant mon esprit, conservant mes idées, me rappelant toujours à ma Mission...
     

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